Taxis, coiffeurs, même combat...

Le 23/06/2015 à 10h12 - Expert Zone

Une fois n'est pas coutume, nous allons parler de taxis aujourd'hui... Et ce particulièrement suite à leurs agissements vis-à-vis des conducteurs et des clients d'Uber Pop (pour ceux qui n'auraient pas suivi l'actualité, à Lyon, un client d'Uber Pop a été tabassé pour avoir utilisé le service...). Outre le fait que ce sont des méthodes parfaitement illégales qui vont se finir en fait divers, ce qui est reproché à la profession, c'est qu'elle se soit assise pendant des années sur un acquis (les licences), et qu'elle n'a pas su faire évoluer la qualité de son service, pour s'adapter à un marché qui lui est en marche. A quoi bon après tout, quand vous êtes en situation de monopole, pourquoi vous faire c***r à proposer aux clients une satisfaction de service ? Ils n'ont pas le choix... Ce qui permettait aux taxis de dicter leurs lois, de refuser des courses si "ce n'est pas sur mon chemin", de se permettre des écarts de routes pour alourdir la facture, de se permettre des comportements et des propos inacceptables vis-à-vis de la clientèle, arnaques aux touristes (avec la bien connue arnaque de l'aéroport, qui consiste à emmener les touristes dans le mauvais aéroport pour doubler le prix de la course)... 
Seulement voilà, ce que n'avaient pas prévu les taxis, c'est l'arrivée d'un "game changer", comme l'est Uber. Société aux pratiques peu recommandables soit, mais qui répond à un réel besoin de la clientèle : un service de transport de qualité. Et force est de constater que le service proposé répond aux attentes du marché, quand on voit la croissance incroyable de la société. Mais alors, comment réagir ? Et bien il existe 2 possibilités :
- La réaction du primate qui consiste à "casser du Uber" et à se retrancher derrière les droits d'entrée sur le marché, et les investissements qu'ils ont du faire pour pratiquer ce métier (en omettant bien entendu de préciser que l'achat de la licence n'est pas un droit d'entrée sur le marché, mais un investissement sur le long terme). Et espérant en même temps ne pas avoir à augmenter leur qualité de service, et à continuer à faire "comme on a toujours fait". 
- La réaction de la personne évoluée, qui décide de faire avec cette nouvelle concurrence et d'adapter son service pour miser sur ses points forts. Et l'avantage concurrentiel des taxis reste, malgré ce que l'on veut vous faire croire, extrêmement important. 2 exemples frappants : la maraude (le fait de pouvoir prendre des personnes qui vous arrêtent dans la rue) et le quasi-monopole sur les points d'arrivée (impossible de commander un Uber à un aéroport par exemple). 
Si fort heureusement de nombreux taxis ont bien compris cela, et optent pour la solution n°2, il reste une poignée d'entêtés qui continuent à réagir comme un primate, et qui au passage détériorent de manière phénoménale l'image du métier (ce sont eux que l'on voit à la télé, pas les taxis qui font consciencieusement leur travail...). Et nous ne parlerons pas de Mr Roussel et de sa société qu'est TAXI G7, qui asservit et appauvrit depuis des années une profession d'artisans au travers de locations de terminaux de réservation...
Quel rapport avec la coiffure me direz-vous ? Et bien sans partir dans des comparaisons extrêmes, les similitudes sont flagrantes :
- Les 2 professions sont des professions réglementées : les taxis par l'achat de leur licence, les coiffeurs par l'obtention de leurs diplômes
- Les 2 métiers connaissent une crise sans précédent (explosion de la possession de véhicules personnels pour les taxis, qui a considérablement réduit l'utilité de leurs services, espacement des visites chez le coiffeur et augmentation du DIY pour les coiffeurs)
- Apparition de "game changers" dans les deux métiers : Uber pour les taxis, les salons low cost pour les coiffeurs
- Acteurs du marché "endormis sur leurs acquis" depuis des années (taxis se reposant sur leurs licences, coiffeurs se reposant sur leurs compétences)
Seulement voilà, le marché de la coiffure tout comme le marché des taxis a évolué depuis des années. Et cette évolution s'est menée sur 3 fronts en parallèle :
- Les produits : s’il y a 20 ans, les produits mis sur le marché nécessitaient une vraie formation pour les utiliser correctement, l'évolution des molécules et des formules à permis de mettre sur le marché des produits dont les risques d'usage par une personne non-initiée sont limités (bien qu'existants, je vous l'accorde). Un report de la consommation s'est donc effectué depuis les salons de coiffure vers les grandes surfaces, au détriment des coiffeurs qui perdent en chiffre. 
- Un marché qui a refusé toute forme d'évolution : et c'est probablement ce qui me choque le plus... Chaque semaine, je reçois des messages de salons de coiffure désireux de se faire déréférencer de MeilleurCoiffeur... POURQUOI??? Ce site vous offre de la visibilité gratuitement, et vous apporte de nouveaux clients. Pourquoi refuser d'y être référencé ? Tout simplement parce que les coiffeurs sont effrayés par toute forme d'évolution. "Donner la parole à mes clients ? Ah non, jamais, on a toujours fait sans, je ne vois pas pourquoi on devrait commencer aujourd'hui"... Une constatation qui s'étend sous toutes les formes possibles et inimaginables : parc de salons vieillissant, qualité de service restée similaire au fil des années (sisi, je vous assure, il existe encore des salons qui ne proposent pas de café à leurs clientes...), refus de se former... 
- Des games changers qui ont "dégradé" l'image du marché : c'est probablement ce que l'on entend le plus quand on parle avec des coiffeurs... "Oui, mais les Tchip / Beauty Bubble... ont dégradé l'image de la profession...". Peut-être, mais eux font le plein pendant que les salons "du ventre mou" se désertent. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'ils ont compris l'évolution du marché, et plus particulièrement celui des produits de coiffure. Pourquoi aller payer une couleur dans un salon lambda 90 euros, alors que je peux la faire chez moi à 15 euros ? Soit, les produits ne sont pas de qualité équivalente, mais le produit à lui seul justifie-t-il un rapport de prix de 1 à 6 ? 
Comment font les coiffeurs pour réagir face à cette évolution ? Et bien, il y a les mêmes réactions que chez les taxis :
- La réaction du primate : on ne change pas, et on dégrade davantage sa qualité de service. On "casse du produit de GMS" en espérant que le client sera convaincu, mais en parallèle, on les utilise pour tromper nos clients et augmenter nos marges (cf. la photo ci-dessous qui a buzzé hier soir sur Facebook, ou la gérante d'un salon demande à son employée de remplir une bouteille de Mythic Oil avec du Timotei vendu en GMS...). On casse du Tchip qui dégrade notre beau métier, mais on n'essaie surtout pas de comprendre pourquoi eux font le plein quand moi je peine à boucler les fins de mois. Et surtout, le plus important de tout... On ne change rien. On fait comme ça depuis des années, surtout ne pas changer, ce n'est qu'une mauvaise passe... Si vous êtes dans ce cas, croisez les doigts, et votre salon tiendra peut-être encore 6 mois... 
- La réaction de la personne évoluée : On se remet en question. On change le positionnement de son salon, pour quitter le "ventre mou" et pour offrir un vrai positionnement à son salon. On adapte sa qualité de service et ses prestations aux attentes du marché. On va chercher le client la ou il est (Internet), et on n'attend pas que bouche-à-oreille se fasse trout seul...
Et surtout, on a compris que le salut de son salon en passera plus par les produits, mais par la coupe. Les clientes seront dans le futur de plus en plus nombreuses à effectuer leurs techniques à la maison (explosion du DIY). En revanche, il y a une prestation qui ne pourra pas être faite à la maison, celle-ci demandant trop de formation : la coupe. Et c'est justement la coupe qui est la barrière à l'entrée du métier de coiffeur. Une femme peut décider de se colorer elle même les cheveux, ou tout simplement décider d'arrêter de se les colorer. Mais malgré toute sa volonté, elle ne pourra décider d'arrêter de faire pousser ses cheveux... Et elle ne le fera jamais elle même non plus, les résultats promettant de réelles catastrophes... 
Amis coiffeurs, ne soyez pas aussi bornés que les taxis. Le marché à évoluer, vous ne pouvez pas aller à son encontre... La seule chose qu'il vous reste à faire, c'est de surmonter votre peur du changement, et de vous adapter ! Et si vous ne nous croyez toujours pas après lecture de cet article, je vous invite à méditer sur cette phrase tirée de la dernière étude de marché XERFI sur le marché de la coiffure : "Les indépendants sans enseigne sont les plus touchés [ndrl. 6e année de baisse consécutive du CA du secteur], malgré une structure de coûts plus légère que les salons sous enseigne (locaux plus petits, effectifs restreints, etc.). Souffrant généralement d’une image vieillissante, ils disposent de moyens limités pour investir (rénovation concept, communication, etc.).". N'attendez pas qu'il soit trop tard !
PS : la fameuse photo qui m'a incitée à écrire cet article, et à remettre les choses à leur place :